Recruter à l’heure du numérique

Quelles conséquences pour les simulations d’entretien d’embauche ?

Pour son séminaire annuel (le 6 février 2017), l’équipe de simulation d’entretien avait choisi de réfléchir sur les transformations du marché de l’emploi induites par l’invasion du numérique. Cela faisait suite à un colloque « recruter à l’heure du numérique » organisé par le Conseil d’Orientation pour l’Emploi (COE) auquel avait participé Philippe Saint-Aubin.

Il est banal de constater que le numérique a profondément transformé le marché de l’emploi avec l’apparition de nouveaux acteurs, les sites de recherche d’emploi qu’ils soient dédiés ou non : il existerait 15 000 « job boards » dans le monde pour un marché français de l’intermédiation estimé à 600 millions d’Euros.  En dix ans le nombre moyen de canaux activés par une entreprise pour recruter est passé de 3,5 à 4,9. Sans parler de « l’ubérisation » du travail ou des plateformes de travail à la tâche comme Amazon Mechanical Turk. Les entreprises et les chercheurs d’emploi ont donc adapté leurs stratégies.

Selon une enquête CSA d’août 2016, 91% des chercheurs d’emploi, qu’ils soient déjà salariés ou au chômage, utilisent un outil numérique dans leur recherche et pour 60% d’entre eux cet outil est prioritaire. Il s’agit dans l’ordre :

  • du site de Pôle Emploi (pour 50% des salariés et 61% des chômeurs) ;
  • de sites généralistes tels Jobi Joba, Monster, Keljob ;
  • des sites Internet des entreprises ;
  • du Bon Coin qui dispose d’un portefeuille de 300 000 offres en général de proximité;
  • de sites spécialisés, notamment les réseaux sociaux professionnels comme Linkedin ou Viadeo ;
  • et même de Facebook et Twitter.

Le chercheur d’emploi utilise en moyenne sept pratiques parmi celles testées : consultations multiples de sites, aide à la rédaction ou dépôt de CV en ligne, recherche d’information sur les entreprises, alertes Internet, conseils d’orientation professionnelle, simulation d’entretien, tutoriels, coaching et MOOC divers.

Ces nouveaux outils ont d’abord eu pour conséquence de multiplier les candidatures spontanées ou en réponse à des offres. Ils posent les problèmes connus du numérique sur la transparence des algorithmes, sur la fiabilité de l’information sur les offres et les candidatures et enfin, sur la confidentialité des données. Internet n’a pas rendu le marché du travail plus transparent, mais plus concurrentiel, souvent au détriment des chômeurs par rapport aux candidats déjà en emploi. Les entreprises se sont adaptées à cet afflux de candidatures (un million de CV reçus par an chez Carrefour !). D’une part, elles diminuent leur recours aux petites annonces pour puiser dans leur vivier de candidatures spontanées ; d’autre part, elles utilisent massivement des procédures de tri informatique par mots-clés, soit en interne, soit via un prestataire et ceci au risque d’une standardisation des profils. Selon l’étude du COE, le numérique aurait plutôt entraîné une baisse de la qualité de l’appariement offre/demande dû au « papillonnage » excessif permis par la simplicité des candidatures en quelques clics et l’exploitation en « big data » du gisement de candidats.

Pour autant, les canaux d’accès à l’emploi ont finalement peu changé. L’enquête CSA indique que parmi les sondés ayant trouvé un emploi, 27% l’avaient obtenu par relation personnelle : ce taux est même de 39% chez les plus de 50 ans. On trouvait ensuite à égalité dans 13% des cas les agences d’intérim, les cabinets de recrutement et Pôle Emploi.  Les candidats réfractaires au numérique mettent plutôt en avant le manque de contact humain ou les difficultés physiques ou culturelles d’utilisation de l’outil.

La discussion entre les membres de l’équipe a porté sur les messages à passer lors des debriefings des simulations entretiens. Quelle que soit la méthode de recrutement, l’entretien d’embauche reste un point de passage obligé. Un outil automatique de tri des CV ne permet pas de savoir si le candidat veut réellement venir, s’il s’adaptera au poste proposé ou si ses collègues auront envie de le voir à la machine à café. Pour le candidat, savoir lire une annonce, comprendre ce que recherche l’entreprise et être capable de se présenter en conséquence demeurent des qualités indispensables. Mais trois conseils paraissent pertinents :

  • le tri informatique par mots-clés implique une plus grande attention au vocabulaire utilisé dans le CV et la lettre de candidature. Il faut imaginer les mots clés qui permettront d’être retenu par l’algorithme, en comprenant bien l’annonce. La description des domaines étudiés et les expériences de stage ou extra-scolaires sont à cet égard essentielles.
  • les réseaux professionnels tels Linkedin ou Viadeo sont des mines exploitées par les recruteurs de cadres. Il faut encourager les étudiants à s’y inscrire très tôt. Ils permettent une gestion de carrière plus dynamique.
  • et bien sûr il faut surveiller l’image de soi donnée sur les réseaux sociaux quand le recruteur peut « googler » le candidat en un clic.

Une réflexion sur “Recruter à l’heure du numérique

  1. Bonjour
    Ces informations synthétiques et explicites sur la place d’Internet et des télé-candidatures nous apportent un nouvel éclairage sur les conseils prodigués aux jeunes en recherche d’emploi. je diffuse l’info à l’équipe de la mission locale et l’ensemble des parrains.
    Virginie Turbot

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